08 December 2012

Les mouches en hiver

Ça ne se produit pas souvent, mais ça m'arrive de temps en temps : je ne sais pas quoi faire. Je n'ai pas envie de lire, encore moins de surfer sur le Web, et si je me mets à écrire, c'est seulement pour m'occuper, pour ne pas rester le nez en l'air à regarder les mouches voler, d'autant plus, qu'à l'orée de l'hiver, il est bien peu probable que mon regard puisse suivre le vol nerveux d'une mouche zigzaguant sous le plafond. Alors, en attendant de déterminer à quelle activité intéressante je pourrais me livrer, je déroule quelques phrases sur Traverses. Je pourrais dire que, depuis hier, le froid s'est installé sur la région, porté par le Mistral qui passe sur les Cévennes où il a peut-être commencé à neiger. C'est-à-dire que je pourrais m'étendre sur les conditions climatiques, car c'est souvent la première chose qui vient à l'esprit quand on n'a rien à dire. Je pourrais donc le faire, mais je ne le ferai pas parce que je pense avoir la possibilité de parler d'autre chose que de météorologie... D'astrologie, par exemple. Pour cela rien de plus simple, il me suffit de lire l'annonce du jour relevée sur n'importe quelle feuille de chou éditée en ligne et de dire ensuite si les prévisions faites ce matin correspondaient ou non aux événements de la journée qui est, maintenant, sur le point de finir. Mais, ça non plus, je ne le ferai pas. J'ai la flemme d'aller chercher cette information sur le Net. Je pourrais évoquer les conversations tenues avec mes animaux après le repas, quand nous sommes réunis et rassasiés autour des gamelles presque vides, pour parler de choses et d'autres, des aléas de l'existence, de la marche du monde. Mais non, c'est sûr, je ne ferai pas çà. Tout simplement parce que la teneur de nos discussions ne regarde personne : ces échanges de paroles entrent dans le cadre de la vie privée que je n'ai pas l'intention de dévoiler, sachant que n'importe qui peut lire ce billet. De toute façon, c'est sans importance, puisque mon but est presque atteint : arrivé ici, là, sur ce mot, j'ai allègrement dépassé les 2100 signes, ce qui est largement suffisant pour composer un billet. Je viens d'ailleurs de faire la preuve que je suis en mesure d'employer mon temps à autre chose que de suivre des yeux les mouches qui ne zigzaguent pas sous le plafond, sachant que nous sommes presque en hiver et qu'il fait vraiment froid depuis hier. Mais, encore une fois, laissons les conditions météorologiques de côté, et finalement applaudissons des deux oreilles pour avoir su si bien employer la fin de la soirée en rédigeant un billet qui, par son insignifiance criante, chagrinera celui qui aura la patience de le lire en entier, mais qui me procure la douce illusion de ne pas avoir perdu mon temps en regardant voler les mouches qui, de toute manière, ne volent pas. N'oublions pas que nous sommes en hiver et, qu'en cette saison, un blogueur doit occuper ses soirées du mieux qu'il le peut. Ne pas désespérer, l'été viendra !

03 December 2012

Poème à la con

Caché dans les buissons, moi, le moujik affamé en haillons, blafard et déchaussé, je chante de belles chansons, je danse, je dessine au crayon, j'apprends, j'écris et je récite des poèmes à la con. Hier, à midi et demi, je sortais de prison. Mon âme est morte dans la nuit, noyée dans la fontaine où, ivre d'avoir perdu mes chaînes, je suis tombé. Mon âme de poète clamsée, noyée dans les tourbillons, mes vers ne sont plus très bons, moins bons que ceux que j'écrivais en prison ; mais ces vers restent très chers à mon coeur. Lecteur, toi qui lit mes poèmes à la con, ne soit pas si sévère, je ne suis qu'un pauvre moujik hagard et en haillons qui a perdu son âme, à deux pas de la gare, dans une fontaine où sourd l'eau marron. Aide-moi à retrouver mon âme, ne t'empresse pas de me couvrir de blâmes. Si tu penses que mes poèmes sont vraiment mauvais, passe près de la fontaine qui a volé mon âme, rends-toi donc à la gare, saute dans le TGV bourré de Mallarmé bien inspirés et de Chateaubriand bien croustillants. Lecteur, fonce à quatre cent à l'heure vers La Capitale, va au café des Fleurs, installe-toi parmi les poètes, ces travailleurs bien nourris, bien habillés, bien branchés, écoute leurs conversations à la con. Et puis reviens, lecteur, reprends le TGV, reviens vers mes buissons, pour me dire qui sur cette terre fait les meilleurs vers, qui sont les véritables poètes à la con. D'ici là, j'aurai sûrement repêché mon âme, jeté mes vieux crayons, reprisé mes haillons. Quand tu seras de retour, lecteur, alors sonnera, pour le vieux moujik que je suis, l'heure de quitter les buissons. Ainsi, viendra l'instant du retour vers ma première maison. J'irai jusqu'au bout du champ retrouver le grand chêne au pied duquel j'enterrerai mes poèmes à la con, tous ces longs vers amers écrits en prison.

21 November 2012

Exorcisme

Je ne me souviens plus de la date exacte à laquelle j'ai acheté un Nikon CoolPix 4500, ma première caméra numérique, mais je suppose que cela remonte au mois de novembre 2002, puisque, parmi les photos que j'ai conservées, 18 sont classées dans le dossier le plus ancien de mes archives Images, portant la date du 16 novembre 2002, dont celle publiée ci-contre. Voilà donc 10 ans que, muni d'un appareil numérique, je découpe, sans état d'âme particulier, la surface du monde dans des formats pixellisés. J'ai lu et entendu toutes les théories possibles et imaginables sur la photographie. Je me garderai d'exposer ma conception de l'art, parce que ce que je pourrais en dire ce soir ne correspondra certainement pas, ou peu, à ce que j'en penserai demain. Mais, ce qui me convient parfaitement, c'est l'idée que la photographie soit en partie liée à un rituel magique, comme le suggère Jean Baudrillard : « La photographie, c'est notre exorcisme. La société primitive avait ses masques, la société bourgeoise ses miroirs, nous avons nos images. » Alors, pour exorciser mes vieux démons virtuels, depuis 10 ans, je pixellise.

07 November 2012

La Distinction

Je n'aime pas écrire le matin. Je n'aime rien le matin. Si Pat, le plus glouton de mes animaux, m'oblige à sortir du lit quotidiennement, lorsque le jour se lève — vers 7:00 AM en cette période de l'année —, pour lui servir son petit-déjeuner, je ne me sens véritablement réveillé que 4 ou 5 heures plus tard. Étant donné que je considère l'écriture comme une corvée, on peut comprendre aisément que je ne suis pas en état d'aligner dix mots quand pèse encore lourdement sur ma cervelle la sensation d'avoir encore sommeil. Une douche à l'eau froide, quelque soit la saison, et quelques litres de café ne sont pas suffisants pour me délester de cette somnolence matinale qui paralyse en grande partie mon activité. Voilà pourquoi, généralement, mes rares billets ne sont écrits et publiés que tard dans la soirée.

Le matin, je me contente souvent de lire des textes sans importance qui ne demandent aucun effort intellectuel, des choses informes, sans relief, publiées sur des blogs que les moteurs de recherche classent sous le thème "Littérature". Dire que je lis, n'est pas exactement ce qui correspond à ce passe-temps matinal, car en réalité je ne fais que survoler les billets d'auteurs à l'avant-garde de "la web-littérature" [sic] d'un oeil à peine entrouvert, en n'allant que très rarement au bout du texte qui défile sur mon écran, car, de toute façon, même en étant bien réveillé, ces billets restent illisibles et n'ont aucun intérêt.

Alors, pourquoi passer du temps à survoler des choses insignifiantes ? Pour ne pas perdre de vue que je vis dans un monde peuplé de gens médiocres, inconscients de leur médiocrité, mais animés par la volonté de prendre ne serait-ce qu'une parcelle de pouvoir sur l'autre afin de l'amener à penser, puis à agir comme ils croient bon de le faire. Individuellement, ces gens se savent impuissants. Mais, ils savent qu'en se regroupant, d'une manière ou d'une autre, ils seront peut-être en mesure de peser sur les mentalités et de faire passer leurs idées — en admettant qu'on puisse parler d'idées.

Ces pauvres gens font ce qu'ils peuvent pour tenter de disposer d'un compte bancaire culturel suffisamment important, ce qui les placerait dans une position dominante au sein de la société, mais ils ne s'en donnent pas vraiment les moyens, et passent ainsi leur existence à se casser le nez. Comme le faisait remarquer, il y a quelques années, un sociologue médiatique bien connu du public français : « Tout prédispose le petit-bourgeois à entrer dans la lutte de la prétention et de la distinction, cette forme de la lutte des classes quotidienne d'où il sort nécessairement vaincu, et sans recours, puisqu'en s'y engageant il a reconnu la légitimité du jeu et la valeur de l'enjeu. »

Par charité, je me dis qu'il faudrait faire comprendre à ces pseudo-lettrés qu'ils s'épuisent inutilement. Et que, même s'ils parvenaient à vendre dix epub dans leur vie, le jeu n'en vaut pas la chandelle. Car, comme le dit Le sociologue, caresser l'espoir de devenir un écrivain reconnu, en s'attelant en dilettante à cette tache, est une entreprise forcément vouée à l'échec. De surcroît, je pense qu'il faudrait leur faire entendre que se renforce par cette pratique, animée par de vaines prétentions, le système hiérarchique opprimant qui est à l'origine de leur mal-être.

Les petits bourgeois bohèmes rêvent d'une société égalitariste, débarrassée de toute passion élitiste, où la production intellectuelle de l'un n'aurait pas plus de valeur que celle de l'autre. Un rêve qui les déchargerait d'être en permanence dans une compétition pour laquelle ils sont très mal préparés, les obligeant à vivre dans un monde où il se font en permanence marcher sur les pieds.

Au lieu de foutre le feu aux écoles, aux journaux, aux TV, aux cinémas, aux théâtres, aux salles de concerts, aux galeries d'art, aux musées, aux librairies, aux bibliothèques, ce qui les affranchirait du joug de la Culture et, par conséquent, du grappillage intellectuel quotidien auquel ils se livrent pour se constituer un petit pécule symbolique, les petits bourgeois bohèmes font tout le contraire : ils sacrifient leur temps libre et ce qui leur reste d'énergie, après une journée de labeur, à renforcer un système solidement appuyé sur "la distinction" qui les contraint à « la fréquentation des antiquaires, la prédilection pour un intérieur confortable et pour une cuisine de tradition, la fréquentation des musées du Louvre et d'Art Moderne, le goût du Concerto pour la main gauche dont on sait qu'il s'associe presque toujours à la pratique du piano » et, bien sûr, à la production d'epub, summum sur l'échelle des valeurs distinctives.

Ce type d'activités va à l'encontre de l'idéal égalitariste des créateurs de "la web-littérature", de leur volonté de démocratiser la production artistique, comme le souhaitait une professeure certifiée de Clermont-Ferrand en conclusion d'un échange de commentaires sur Google Plus : « Un dernier mot..... une conversation, qui fait réfléchir sur ce qu'est l'art, et qui me conforte ds l'idée d'humilité, et de proximité, je n'aime pas les hiérarchies, ou les classifications, qui donnent des prix, mais j'aime l'idée d'un art proche, accessible, encore une fois, un art populaire, je n'ai pas dit folklorique, encore moins démagogique, mais tissé, ds la vie de tous les jours, et de tous, travaillant la vie de tous les jours, et de tous, comme un ferment....! » Aussi, les intellos du Web doivent faire face à une structure bien connue, celle du dilemme du prisonnier : la situation à laquelle parviennent les protagonistes, s'ils ne coordonnent pas leur décision, est inférieure pour chacun d'eux à celle à laquelle ils accéderaient si collectivement les acteurs s'entendaient avant d'agir.

Si, d'un commun accord, tous les bobos intellos renonçaient à écrire des epub, leur capital symbolique resterait intact, leur vie ne serait pas travaillée tous les jours par "le ferment de l'art", et ils n'auraient plus à se tuer sur le Net où tous bataillent pour briller sans jamais y parvenir réellement ; en revanche, ils y gagneraient en siestes plus fréquentes, se coucheraient plus tôt dans la semaine, ne seraient pas agrippés au clavier du PC tous les dimanche et jours fériés, et, bien sûr, ils vivraient plus heureux en maltraitant beaucoup moins souvent leur petite cervelle improductive toujours au seuil de la rupture d'anévrisme.

Évidemment, les producteurs acharnés d'epub ne se mettront jamais d'accord pour faire cesser collectivement leur manie consistant à remplir de mots inutiles des montagnes de pages électroniques, parce qu'ils sont arrivés à se persuader que leur vie dépendait de cette activité. Il n'est pas rare de lire, çà et là, sur les blogs constituant "la web littérature", des phrases qui disent peu ou prou la chose suivante : « J'écris d'accord mais pourquoi ? Merci de m'avoir permis d'évoquer cette question. Écrire, lorsque c'est un besoin vital, une pulsion impérieuse, une évidence comme respirer et manger, c'est amener de la lumière, de l'oxygène, de la nourriture à soi d'abord. Puis, aux autres peut-être... au monde pourquoi pas. Écrire c'est être un témoin transmetteur sans savoir ce qui sera transmis et avec l'espoir fou que cela amènera peut-être à une personne un supplément d'âme, une seule personne et c'est bien suffisant pour écrire toute une vie. Faute de témoin transmetteur, il me semble que des pans entiers de vie seraient voués à l'oubli, ... rien que pour ces morceaux d'humanité sauvés sur une page, dans une lettre, ça vaut toutes les peines d'écrire. — Sandrine » Enfermés dans un état d'esprit pareil, les graphomanes du Net semblent actuellement incurables. D'autant plus que pas l'un d'entre eux n'essaye de se départir du cette espèce de dogme, ni d'en élucider l'origine qui pourtant me semble assez évidente.

Mais, bon... Loin de moi l'idée de modifier le comportement de pauvres gens, qui se complaisent à embrouiller leur petit cerveau en s'adonnant à des exercices périlleux pour leur équilibre mental, prêts à engager en vain une bonne part de leur faible énergie et même à sacrifier des jours fériés, puisque ça leur procure la douce illusion de faire progresser dans le meilleur des sens possibles l'entité la plus importante à leurs yeux : l'Humanité. Chacun sa religion !

10 October 2012

Opinion

Je m'intéresse à la politique comme à la religion, mais aussi à un tas d'autres choses qui meublent le quotidien des hommes et des femmes avec qui je partage une portion de territoire sur cette maudite planète. Je veux savoir ce qui les anime, comment leur imaginaire est travaillé par les mythes, et les conséquences que cela peut avoir sur le paysage qui s'étend sous mes yeux. Mais, je ne participe en rien à toutes ces histoires : je ne me sens absolument pas concerné par tout ça. Si je m'y intéresse, c'est justement pour deviner où se cachent les espaces, les interstices qui restent inoccupés, à l'abri des tentacules des idéologies, hors du merdier habituel, pour pouvoir les investir en espérant toujours échapper à cet immense bordel. Car j'essaye en permanence d'avoir la paix, ainsi que le maximum de liberté — c'est-à-dire pas grand chose, mais toujours plus que n'importe quel citoyen, n'importe quel dévot républicain qui barbotent volontairement dans la démocratie, l'eau bénite de la politique, ce cloaque pour lequel ils sont prêts à se battre.

09 October 2012

Effluves de chicorée

Selon la critique toujours aussi fumeuse de Pierre Assouline, « le miniaturiste en Echenoz n’a pas son pareil pour dire en passant "le ronflement rauque du couteau à pain sur la croûte" suivi du "tintement de petites cuillers dans les effluves de chicorée" ». Deux phrases qui d'emblée me dissuadent de lire un type comme Echenoz, alors qu'elles sont censées m'y encourager. Je demande ce qui pousse les lecteurs à parcourir actuellement, c'est-à-dire depuis un demi-siècle, les textes des auteurs de fiction français, ce qu'ils y cherchent et ce qu'ils y trouvent. De Tournier à Djian — ou qui vous voudrez à la place de Djian —, en passant par Le Clésio, chaque fois que j'ai essayé d'entrer dans l'univers de l'un de ces écrivains — appelons-les ainsi —, j'ai rapidement reculé pour refermer solidement la porte : les vingt ou trente premières pages, dans lesquelles je m'étais engagé, me hurlaient de fuir, de ne pas perdre mon temps.

Quand je pense que certains éditeurs — appelons-les comme çà — tentent de me vendre des textes illisibles, qui n'arrivent même pas à passer les barrières, pourtant très peu élevées, des grandes maisons d'éditions françaises, en qualifiant ces ramassis de mots — souvent mal orthographiés —, de "littératures d'avant-garde", je me demande s'il me faut rire ou pleurer. Je me demande surtout comment ces textes sous forme de .pdf ou de .epub trouvent des lecteurs, sachant que j'ai déjà pas mal de mal à comprendre qu'il puisse y avoir de gens pour acheter et lire Tournier, Echenoz, Djian et compagnie...

J'ai parlé de ça à mes animaux. Je leur ai demandé ce qu'ils en pensaient. Ils n'ont pas mis longtemps à délibérer : « Ne te casse pas la tête, la cause est évidente : ces lecteurs sont bêtes, tout simplement bêtes et incultes, bien qu'ils prétendent le contraire. Ils ont surtout beaucoup trop de temps à perdre. Et la littérature — employons cette dénomination — française actuelle est le meilleur moyen de perdre son temps, avec un rapport vacuité / prix inégalable pour les textes "non-matérialisés", fabriqués et vendus par une flopée d'imposteurs quasi illettrés, déguisés en écrivains d'avant-garde et poussés sur le devant de la scène Web par de petits techniciens déclassés du monde industriel, mais néanmoins malins, avides d'argent facile. »

19 September 2012

Festivus est déprimé

L'équinoxe d'automne aura lieu dans trois jours, mais on sent bien que l'été est déjà fini. Depuis plus d'une semaine, les températures maximum ne passent pas la barre des 25°C. Hier, le ciel est resté gris presque toute la journée. Aujourd'hui, le vent frais soufflant du nord n'a pas chassé tous les nuages qui, furtivement, voilent assez souvent le soleil. Je ne regretterai pas cet été moribond, avec son atmosphère trop fréquemment chargée d'humidité faisant de cette saison une période désagréable à vivre. De toute façon, mes animaux et moi, nous sommes contents de voir venir l'automne parce que c'est la saison que nous préférons.

A cette époque, l'homo festivus est généralement déprimé, car il doit reprendre un travail qu'il déteste et sait qu'il va avoir des difficultés répétées pendant onze mois. Comme il n'a pas beaucoup le moral, il a tendance à la mettre un peu en veilleuse, d'autant plus qu'il faudra qu'il tienne le coup jusqu'aux premiers congés, c'est à dire jusqu'en novembre. Le beau bronzage, récolté en même temps que les mycoses sur les plages de la région, a déjà disparu — restent les mycoses —, ce qui accentue la mine maladive et l'impression que ce malheureux travailleur connaît toutes les peines du monde à reprendre le chemin de son existence routinière. Il a dansé tout l'été, le voici en train de claudiquer. D'ailleurs, les médias, à la solde des puissants — c'est bien connu, mais rarement admis —, font tout pour lui faire voir l'avenir sous le jour le plus sombre, histoire de calmer même les plus festivus de son espèce.

Alors, quand je délaisse un moment mes animaux pour aller au ravitaillement, je croise sur mon trajet, dans les rues et les supermarchés, des ombres blafardes* presque silencieuses, de tristes individus faciles à ignorer, accentuant ainsi la merveilleuse illusion d'être presque seul au monde, le dernier des hommes, des vrais, des sapiens.

Vive la fin de l'été, vive la rentrée, vive le début de l'automne, vive l'augmentation du pétrole et du gaz, et même des cigarettes ! Vive la crise !

* Notez l'oxymore, fait pour hausser d'un cran la valeur poétique du texte

01 July 2012

Touriste versus sportif ou artiste

Temperature: 18.1°C | Humidity: 94% | Pressure: 1018hPa (Falling) | Conditions: Light Rain | Wind Direction: NNW | Wind Speed: 8.0km/h Je viens de copier le bulletin météo sur Weather Underground. On a un peu de mal à croire qu'il s'agit d'un relevé fait un 1er juillet. Je ne me plains pas parce que, lorsqu'il fait chaud, ici, à Montmerdier, on a l'impression de vivre sous les tropiques. Dans cette maudite région, il ne fait que très rarement chaud et sec, en été. Généralement, quand les températures passent la barre des 30°C, le taux d'hygrométrie est au dessus de 60 %. C'est très désagréable.

Quand je pense qu'il y a des gens qui sont prêts à rester coincés des heures durant dans une bétaillère volante pour atteindre des endroits où ils vont transpirer à grosses gouttes toute la journée et même toute la nuit, s'ils ne se sont pas réfugiés dans une chambre climatisée, et que ces gens-là payent pour ça... Pire : quand je pense qu'ils osent raconter à leur retour qu'ils ont vécu, le temps de leurs vacances, dans un lieu paradisiaque... Je me dis que les propagandistes au service de l'Industrie du Tourisme sont vraiment des cadors !

Quant aux touristes, n'en parlons pas. Sur l'échelle des imbéciles, je suis parfois tenté de les classer sur un niveau inférieur à celui des sportifs qui représentent pourtant le bas du tableau. Un premier échelon que ces derniers se disputent avec les acteurs, les musiciens, les photographes, les écrivains, globalement les "artistes". C'est à dire tous les bas-de-plafonds que les médias audio-visuels français drainent vers leurs studios, exhibent sur des plateaux. Car, les touristes font de gros efforts pour paraître encore plus cons que ces deux catégories de crétins.

La seule différence, c'est que les touristes ne sont pas des professionnels et qu'ils ne peuvent pas se permettre d'être aussi cons toute l'année : ce ne sont que des intermittents de la connerie. Alors que les sportifs et les "artistes" ont fait de la pure bêtise un métier.

Je me demande si ces crétins professionnels sont moins cons lorsqu'ils sont en vacances, s'il leur arrive de prendre un peu de repos. Mais je crains que non. On le sait : quand les sportifs et "artistes" ne travaillent pas, la première chose qu'ils font, c'est pendre un avion pour partir sous les tropiques et jouer aux touristes... Putain de civilisation !

18 June 2012

Soumission volontaire aux chaînes

C'est en lisant la news letter du quotidien suisse, Le Temps, que j'ai appris les résultats du second tour des élections législatives qui s'est déroulé hier : "Le Parti socialiste remporte la majorité absolue, mais l’échec de Ségolène Royal à La Rochelle ternit la victoire aux élections législatives. Marine Le Pen rate son entrée à l’Assemblée nationale, mais sa nièce et l’avocat Gilbert Collard entrent, eux, au parlement".

Je n'avais pas branché la radio depuis samedi matin. Et, il m'arrive de moins en moins souvent de lire la presse en ligne. Je ne pense plus à ouvrir mes comptes Twitter — il me faut être complètement désœuvré, en panne d'idées récréatives, pour être incité à le faire. Et quand ça m'arrive, je quitte généralement les pages de Twitter au bout de cinq minutes, tellement l'insignifiance des messages m'accable. Dire que j'ai passé des heures face à l'écran de mon PC, fasciné par les flux de ce réseau social... En y repensant, je me demande ce que je pouvais trouver d'attrayant dans cet infâme marécage.

Si j'ouvre encore Google Plus assez régulièrement — une ou deux fois par jour —, c'est pour me tenir au courant de ce que peuvent annoncer en ligne deux ou trois de mes contacts les plus proches. Autant dire, pour résumer, que la façon dont tourne le monde, et particulièrement le monde virtualisé, m'est de plus en plus indifférente.

Dans le domaine des réseaux sociaux, seul Pinterest trouve encore grâce à mes yeux, bien que progressivement le temps que je passe quotidiennement à construire une collection d'images se fait de plus en plus bref. Pour le moment, je ne suis pas sur le point d'abandonner ce réseau : j'y trouve encore des choses qui animent la curiosité qui me porte vers la découverte en ligne des arts plastiques. Par son fonctionnement, Pinterest me procure aussi le plaisir de contempler en photos une foule de beaux animaux — "beaux animaux" est un pléonasme, les animaux sont toujours beaux, seuls les quadrupèdes humains sont laids, et très exceptionnellement beaux.

Je m'égare un peu, mais pas tant que ça, puisque, si je me préserve des informations qui passionnent mes contemporains — la politique, le sport, l'économie, les divertissements, les produits de consommations, le travail, le sexe, les maladies, le tourisme, etc. —, en ne prêtant plus attention aux pseudos évènements dont ils sont abreuvés jusqu'à l'ivresse, on comprendra que c'est parce que je classifie tout ce qui apparaît indispensable à leur triste existence comme absolument inutile, et que je me contente, au contraire, de ce qui leur semble totalement futile, tel que le plaisir de discuter longuement avec mes animaux. Mes animaux m'en apprennent bien plus sur le monde que toutes les chaînes d'informations réunies.

Une mouche m'est dix fois plus précieuse qu'un connard comme ce Thierry Roland que la France entière vient de pleurer à chaudes larmes. C'est d'ailleurs pour éviter d'entendre les monstrueuses jérémiades qui, dès l'annonce de la mort de l'idole nationale du jour, commençaient à parasiter les ondes que je n'ai pas remis la radio au cours de ce week-end. Putain de civilisation !

15 May 2012

Le Bon Filon

Les jours passent et seul le volume d'images épinglées sur Pinterest m'indique que quelque chose sur le Web éveille encore pour moi un peu d'intérêt, que tout n'est pas complètement détérioré, que quelques terres vierges méritent d'êtres explorées. Perçue sous l'angle des réseaux sociaux, la Toile me paraît presque désagrégée, atomisée, car plus rien ne fait sens. Il me semble que tout a croulé sous le poids de la masse, suite à une trop grande accumulation de données triviales et totalement insignifiantes. J'ai l'impression, face à l'écran, de me perdre dans un univers extrêmement bruyant, un vacarme d'où il est de plus en plus difficile d'extraire un signal porteur d'intelligence. Si, sur Google Plus, la somme de mes cercles totalisaient 3694 profiles au début du mois, je n'en compte plus que 766 aujourd'hui. Je devrai encore réduire ce chiffre à 10 profiles environ pour refléter réellement l'activité des internautes qui postent, plus ou moins régulièrement, quelques informations passablement intéressantes. Bref, c'est le bordel !

Piloter sur cet immense marécage encombré de déchets, c'est prendre le risque de se retrouver prisonnier d'un amoncellement de merdes à la dérive. Pour éviter ce genre de déboires, il faut naviguer rapidement vers une destination connue, parmi celles inscrites dans nos bookmarks du temps où l'on pouvait encore se baguenauder sereinement sur le Net. Maintenant, quand on sort sur la Toile, on doit toujours pouvoir passer en force, donc penser à ne jamais trop réduire sa vitesse, garder à l'esprit la dangerosité des courants qui tentent de vous rabattre contre des monceaux de fadaises artistiques, poétiques, littéraires et autres. Ces mots qui ne désignent presque plus rien et ne sont plus que l'ombre de ce qu'ils furent avant que ne déferle le tsunami soulevé par quelques petits malins voraces et tenaces qui ont su flatter une profusion de "créateurs" en mal de reconnaissance.

Car ils sont des milliers à se croire appelés par la Gloire, à penser qu'un epub changera bientôt leur vie. Bien sûr, ils ne vous l'avoueront jamais, et prétendent qu'ils polluent le Web uniquement pour le plaisir d'agiter leur petits doigts agiles sur un clavier. Le problème, c'est que ces créatures ne se rendent pas compte qu'elles participent de la même manière à ce que furent les débuts du tourisme de masse, quand les agents de voyages ont senti que le bon peuple était prêt à s'envoyer en l'air sur la Costa Brava ou, un peu plus loin, sur la Costa del Sol, et qu'il passerait bientôt le Détroit pour des destinations encore plus exotiques. Trigano a fait fortune avec son Club Méditerranée.

Aussi, certains pensent qu'il est temps de se lancer dans le business des agences culturelles de masse en se spécialisant dans le domaine du tourisme textuel. Ils montent des entreprises qui vous permettront de vivre dans la peau d'un écrivain, d'un poète, d'un plasticien comme le touriste d'antan a pu se glisser dans la peau d'un Stanley ou d'un Livingstone. Le passeport sera un peu plus épais que celui d'un aventurier moderne, puisqu'il aura l'épaisseur d'un petit livre et contiendra tout ce que vous voudrez bien y mettre : des mots, des dessins, des photos, etc.. Tout ça, dans l'ordre qui vous plaira. En contrepartie, la modique somme d'argent, qui vous sera gentiment réclamée, servira à la publication de votre oeuvre au format epub, ainsi qu'à la rapide promotion de ce livre non-matérialisé sur le site de l'agence culturelle. Cette officine en ligne se chargera de tout ou presque. En effet, peu importe que votre syntaxe soit approximative, votre orthographe lacunaire, aucune correction ne sera pour autant envisagée. D'ailleurs, vos improbables lecteurs seront de toute façon bien plus indigents que vous sur ce plan et ne remarqueront rien. Mais, pour vous, n'en doutez pas, le but sera atteint, car vous accéderez alors au titre d'écrivain, poète, plasticien, photographe, en un mot : artiste ! Immaginez !!!

En tout cas, ne venez surtout pas vous plaindre, plus tard, si la nationale 7 du Web est surchargée, si de belles et authentiques pages culturelles sont défigurées à jamais, si les cantines de Palavas les Flux RSS sont toujours débordées, et, si chaque fois que vous mettez le nez sur la Toile, vous vous heurtez à des montagnes d'inepties qui menacent de s'écrouler sur vos cervelles ramollies...

28 April 2012

J'ai donc un peu mal de tête

Ce n'est pas vraiment le bon moment pour rédiger un nouveau billet : j'ai légèrement mal au crâne depuis ce matin, peut-être parce que le vent souffle plein d'humidité, en provenance de la Méditerranée. Le printemps n'a pas réussi à s’installer — le printemps de légende, celui qui fait chanter les petits oiseaux sur les branches verdoyantes des arbres gonflés de sève, se balançant dans la brise légère, sous un soleil radieux. La plupart des gens oublient que, particulièrement ici, dans ce maudit pays, le printemps est plutôt synonyme de pluie, et, qu'en réalité, cette saison se déploie généralement sous un ciel gris, nuageux, terne, avec des températures qui oscillent, dans la journée, autours des 20°C et rarement plus. Mais, c'est sans importance. Je ne suis pas du genre à me plaindre des conditions climatiques, surtout depuis que je ne quitte l'appartement qu'une fois tous les dix jours — jamais plus d'une heure — pour faire des courses indispensables, acheter suffisamment de cigarettes, histoire de vivre quelques jours l'esprit tranquille, en compagnie de mes animaux. J'ai donc un peu mal de tête, et je mets ça sur le compte de la situation atmosphérique, alors qu'il s'agit peut-être d'une surdose d'informations : j'ai laissé hier la radio branchée sur France-Info, un peu plus de dix minutes. En y réfléchissant, il me semble que l'origine de la douleur vient de ce moment d'égarement ; imprudemment, j'ai écouté blablater des journalistes et des politiciens, alors que j'y étais mal préparé. En effet, j'évite de subir ces rafales de sornettes depuis le début de l'année, depuis que la fameuse "campagne" a submergé les ondes radiophoniques. Ce qui fait que, complètement désaccoutumé, privé d'immunité face à ce type de discours, il est bien possible que ma cervelle si sensible, si délicate, si subtile, dorénavant à l'abri des pollutions médiatiques, soit un peu irritée suite à l'incident sonore de la veille. Ce qui est réconfortant, c'est de savoir que ce cirque va bientôt prendre fin, que le taux de scories politiques va sensiblement baisser avec les premiers jours de l'été, et que les ondes radio redeviendront dans quelques temps une source sonore assez inoffensive, en n'émettant ce type de conneries qu'au niveau habituel, régulièrement, sans les déferlantes actuelles. Vivement l'été ! Mais, l'été vient...

11 April 2012

Traverses

Le vendredi 6 avril, j'ai redessiné le template de SCH 2009, que j'ai rebaptisé Traverses. J'ai fait en sorte que le design de ce blog soit dans la continuité de mon site qui était en rade depuis pas mal de temps parce que je ne me donnais plus la peine d'encoder régulièrement de nouvelles pages pour le développer. Redessiner l'ensemble du site m'a demandé une bonne dizaine de jours. Un travail assez fastidieux qui n'est pas complètement fini, mais qui m'a permis d'élaguer tout ce qui ne me semblait pas nécessaire à son bon fonctionnement, telles que quelques enjolivures inutiles ou des pages qui m'ont parues sans intérêt. Traverses présente dorénavant un contenu assez pauvre en quantité, mais avec un avantage : on ne peut pas se perdre dans les méandres du site. J'ai voulu que les pages s'affichent à l'écran le plus rapidement possible, d'où une architecture minimaliste. La sobriété de la présentation ne me déplaît pas. Je suis assez content de mon travail, sachant que j'ai presque tout construit, sans emprunter grand chose aux développeurs professionnels. Il me reste encore à apporter quelques améliorations, à fournir du texte et de nouvelles images. Mais, rien ne presse. L'été viendra...

25 March 2012

Il est 11:45 AM

Il est 11:45 AM. Nous sommes passés, dans la nuit, au rythme des horaires d'été. Je suis furieux d'avoir à caler mon emploi du temps sur ces horaires à la con. Il va me falloir près de trois mois pour m'y faire, pour parvenir à ne pas trop y penser. Je me demande pourquoi, tous les matins, des millions de quadrupèdes humains se présentent volontairement à l’abattoir, sans broncher, avec une à deux heures d'avance sur le rythme solaire naturel. Je pense aux Hopi de l'Arizona qui refusent ce décalage horaire, en ne se pliant pas à la législation étatique, et je maudis la masse informe des citoyens apathiques, incapables de réagir face à cette stupide oppression. J'ai du mal à comprendre pourquoi les foules de travailleurs déjà écrasées sous le joug insupportable des contraintes horaires acceptent impassibles le passage à l'horaire d'été qui fera uniquement le bonheur des touristes imbéciles et, surtout, la joie de ceux qui tondent régulièrement la laine sur le dos de ces idiots. Civilisation de crétins !

22 March 2012

Inquiétante obscurité

Lundi dernier, à 05:14 AM UTC, l’hémisphère Nord de la planète Terre est entrée dans la période du printemps. Mais, à l'heure qu'il est, les Français n'en ont certainement pas encore pris conscience, ne se sont pas rendus compte que la durée du jour primait sur celle de la nuit, puisque, depuis le début de cette semaine, ils sont incroyablement obnubilés, fascinés par un fait divers qui occulte toute autre information et relègue aux oubliettes n'importe quel autre événement. Je suis sidéré par l'ampleur qu'à pu prendre ce phénomène produit par les médias, exploité jusqu'à la corde par les politiciens. J'ai du mal à réaliser que des millions d'individus puissent, si rapidement, se faire laver la cervelle, se laisser poser des oeillères et manipuler à ce point sur la base d'un fait divers aussi insignifiant. C'est ça qui me semble véritablement effrayant. Cette civilisation sur le déclin engendre des mouvements de foule, de profonds remous vraiment inquiétants.