17 April 2011

Les tristes complaintes de la bloggosphere

Il y a tellement de choses avec lesquelles je suis en désaccord quand, exceptionnellement, je me lance dans la lecture de quelques posts - choisis presqu'au hasard sur la bloggosphere francophone - que je pourrais, en réaction, formuler une masse monstrueuse de commentaires.

Évidemment, cela me conduirait à entrer dans diverses polémiques, en supposant que les bloggers, à qui je ferais des remarques sur ce qui ne tient pas dans leur construction argumentaire, me répondent. Je sais que, généralement, ils ont tendance à répondre sans même prendre le temps de lire attentivement la critique qui leur est adressée, et ceci, quand ils se donnent la peine de répondre. Parce qu'ils préfèrent, habituellement, ignorer les inconnus qui ne vont pas dans leur sens, ceux qui ne font pas partie du cercle très restreint des commentateurs privilégiés, c'est à dire du troupeau qui s'est formé au fil du temps à grands coups de brosse à reluire.

Aussi, malgré l'envie de réagir, qui parfois se fait jour en moi, je laisse tomber. Je laisse d'autant plus facilement tomber que ces bloggers sont tellement enferrés dans leurs opinions, ces idéaux prêt-à-porter collants à leur identité comme une combinaison en tissu synthétique, qu'il serait vain de tenter de leur démontrer que, pour telle et telle raisons, ce qu'ils affirment avec tant de convictions ne tient tout simplement pas la route.

Je me demande comment ces individus, qui passent le plus clair de leur temps à entretenir leur symptôme graphomaniaque, ne sont pas encore épuisés à force de rabâcher sur des thèmes qui sont apparus en ligne avec le début de la formation de la bloggosphere. Le statut du blogger vis à vis du journaliste tourmente intensément les bons citoyens qui fréquentent le Web. "Journalistes et blogueurs restent deux mondes clos et étanches. Rares sont les journalistes politiques qui connaissent les blogueurs politiques" déplore un fameux blogger-citoyen, suite à l'article, Les blogs : info ou influence ?, de X. Ternisien, paru récemment sur Le Monde.

Ce qui met en rage les bloggers, ou tout au moins les bloggers de cet acabit, c'est que tout journaliste peut obtenir, quasi instantanément, le statut de blogger - rien de plus simple -, mais, qu'à l'inverse, un blogger ne peut pas accéder en trois clics au statut de journaliste ; l'un étant beaucoup plus prestigieux que l'autre, comme de bien entendu. Cette affaire ne date pas d'hier. Profession blogueur de Y. Eudes, publié le 11 Novembre 2008 sur Le Monde, avait déjà provoqué les mêmes remous. Ce phénomène se produit si souvent qu'il est impossible de citer tous les journalistes qui régulièrement font gémir de douleurs les glorieux bloggers et leurs cohortes. La bloggosphere regorge de complaintes qui chantent toutes le même refrain.

Comme le remarque Ludovic Bajard, directeur associé de Human to Human, au sujet des bloggers, "leur pratique est fondamentalement différente de celle des journalistes. Ils ne respectent pas les trois piliers du métier que sont la distanciation, l'objectivation et le recoupement des sources. Ils sont dans une subjectivité totale par rapport à leur sujet. Ils vivent leur activité comme une passion. Ils se racontent. Lorsqu'un blogueur arrive à une conférence de presse, la première chose qu'il fait est de se prendre en photo ou de se faire photographier..." Cette citation résume, à mon avis, assez bien la situation. Il n'empêche que certains bloggers produisent des billets tout aussi intéressants que certains journalistes, mais c'est rarement le cas, puisque la plupart des individus en pyjamas se contentent de plagier à leur sauce frelatée des articles journalistiques, des dépêches AFP. Le blogger qui publie des billets dignes d'intérêt est une espèce aussi rare que celle du journaliste qui mérite vraiment que ses papiers soient lus avec attention.

Enfin... Tant de mots pour exprimer ce qui m'éloigne des troupeaux de graphomanes batifolants sur les prés hexagonaux les plus verdoyants de la bloggosphere ! Ces pâturages jouxtent de trop près les sombres marécages où la majorité béate, qui les admire, s'enlise !

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